Note: Michel Houellebecq n’est pas un «expert des nouvelles religions» au sens académique du terme. Mais il est reconnu pour être un écrivain qui s’informe et se documente en profondeur sur les sujets qu’il traite dans ses écrits. Afin d’éviter toute forme d’interprétation de ses propos lorsqu’il témoigne de ses expériences auprès de Raël et du Mouvement Raélien, nous allons simplement citer textuellement les extraits d’entre-vues qu’il a accordées à différents médias.
Extraits de L’Illustré 1, décembre 2003
L’illustré: «Comment l’écrivain à succès que vous êtes a-t-il pu rencontrer et sympathiser avec un homme comme Raël? »
Michel Houellebecq : « Disons que j’ai de bonnes raisons de soutenir ceux qui pensent différemment. Pour moi, cela a vraiment commencé avec le problème du clonage. J’ai été stupéfait par la réaction d’indignation générale, surtout en France, quand les Raéliens ont annoncé l’année dernière la naissance du premier bébé cloné. Le clonage était un thème tellement nouveau que l’on aurait pu s’attendre à ce que les gens n’aient pas d’opinion a priori. Mais non! Tout le monde a répété bêtement «C’est monstrueux» et il n’y a même pas eu un embryon de débat. Je n’ai pas compris ce refus immédiat et brutal, avec cette notion de crime contre l’humanité qui était hors sujet. Le politiquement correct est un peu prévisible, mais je ne pouvais pas prévoir que le clonage serait politiquement incorrect à ce point.»
L’illustré: «Et vous êtes tombé sur Raël ?
Michel Houellebecq: «C’est lui qui est à l’origine du débat. J’avais envie d’en savoir davantage, je me suis documenté sur l’Internet. Je suis allé deux semaines en Slovénie, l’été dernier, pour suivre ses séminaires. Raël est un homme sympa, convivial. Ses thèses sont intéressantes. Il a une attitude de respect pour ce que la science peut apporter qui tranche vivement avec les autres religions.»
L’illustré: «L’athéisme, c’est ce qui vous rapproche de Raël, puisque celui-ci dit que Dieu n’existe pas.»
Michel Houellebecq: «Sûrement, oui. La question de l’existence de Dieu est presque embarrassante pour moi, parce que je n’arrive pas à la prendre au sérieux.»
L’illustré: «Vous êtes considéré comme un provocateur, vous avez fait scandale, par exemple, en déclarant que l’islam était la religion la plus conne. Ne soutenez-vous pas Raël par goût de la provocation ?»
Michel Houellebecq: «Il y a peut-être un peu de cela, mais j’essaie de faire en sorte que cela n’influence pas trop mon jugement. Dans l’histoire du clonage, c’est la réaction unanime des gens qui m’a scandalisé. Cette espèce de totalitarisme d’un type nouveau, un peu soft, un peu gluant, mais très efficace. On vous fait comprendre que vous ne pouvez pas dire ceci ou cela, on essaie de vous faire honte si vous pensez mal.»
L’illustré: «Vous ne craignez pas de vous afficher avec Raël ?»
Michel Houellebecq: «Mon cas est déjà relativement grave, mais j’ai quand même le droit de fréquenter qui je veux et de me documenter où je veux. De toute façon, j’ai réalisé à un moment donné que, quoi que je fasse et que je dise, j’aurai des problèmes.»
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Extraits du Nouvel Observateur 2, août 2005
Le Nouvel Observateur «Comment s’est passée votre propre initiation?»
Michel Houellebecq «Je m’étais à l’époque documenté sur la plupart des sectes. J’ai choisi finalement celle qui me paraissait la plus intelligente. Je sais qu’avec elle il n’y aura ni suicide collectif ni détournement d’argent. Elle est adaptée aux temps modernes, à la civilisation des loisirs, elle n’impose aucune contrainte morale et surtout elle promet l’immortalité. C’est cette idée d’immortalité qui m’a attiré vers les Raéliens. Je n’ai jamais aimé la manière méprisante et suspicieuse dont, en France, on parle des sectes. Et j’ai toujours pensé que la phrase banale selon laquelle la religion est une secte qui a réussi correspond simplement à la vérité. J’avais donc besoin d’aller voir de plus près, de l’intérieur, ce qu’est une secte.»
Le Nouvel Observateur «Et comment les Raéliens vous ont-ils accueilli? »
Michel Houellebecq «Ils avaient conscience du danger. Mais, depuis «Lanzarote», ils savaient que je ne leur étais pas hostile. Ils ont donc pris le risque de m’accueillir et de me parler sans rien cacher. J’ai découvert la secte lors d’un stage d’été en Slovénie. Ensuite, je suis allé à une manifestation à Crans-Montana au cours de laquelle, d’ailleurs, «le Monde» a retrouvé ma trace et a suggéré que je pouvais être un adepte du gourou Raël. Ce qui est faux: je le trouve seulement sympathique. Et pour un fan de SF comme moi, ses idées sont intéressantes. Cette initiation, je la raconte dans «la Possibilité d’une île», mais à ma manière. Je suis du genre expressionniste: ce que j’ai vécu, je le relate en accentuant les contrastes et en grossissant les traits. La vie sexuelle du prophète, par exemple, est beaucoup moins débridée que je ne le dis… »