La cour d’appel, 21ème chambre, section A, Répertoire Général 99/32500 dans son arrêt du 8 décembre 1999 dit dans ses considérants :

– Que la lettre de licenciement vise un communiqué paru dans le Monde du 20-21 avril 1997 dans lequel Mme B. se présente comme « directeur scientifique de Clonaid, service spécialisé dans l’oeuvre d’assistance aux parents potentiellement désireux d’avoir un enfant qui soit le clone de l’un d’eux »  dans le cadre d’une activité commerciale et faisant apparaître qu’elle est personnellement impliquée dans cette activité, la lettre poursuit que « l’amalgame possible entre vos  implications et L’Air Liquide est de nature à donner l’impression que la société Air Liquide cautionne des pratiques unanimement critiquées et qui vont à l’encontre de l’image de marque de la société »; que plus loin la lettre indique que ces faits ont fait l’objet de questions quant à l’implication de la société dans le clonage humain, et conclut que les fonctions de Mme B. dans la société sont incompatibles avec ses responsabilités dans Clonaid; que d’autre part la lettre reproche à la salariée de ne pas avoir assisté à un rendez-vous le 29 mai 1997; qu’elle a donc été licenciée avec dispense d’exécuter son préavis qui lui a été payé;

– Que cette lettre s’analyse d’une part, en des griefs quant à l’implication personnelle de Mme B. en faveur du clonage humain, et d’autre part en un manquement à ses obligations actuelles envers la société Air Liquide, considérant tant à créer un amalgame entre la société Air Liquide et Clonaid que dans l’absence injustifiée à une réunion de travail ;

– Que sur cette dernière motivation du licenciement relative à une exécution fautive du contrat de travail par Mme B., les débats et les pièces produites démontrent que le contrat de travail de Mme B. ne contient pas de clause d’exclusivité, que le rôle tenu par Mme B. dans la société Clonaid n’a pas privé la société Air Liquide de la totale participation de cette salariée à son travail qui était en dernier lieu responsable régional des ventes de l’établissement d’Irigny;

Que la société ne démontre pas en quoi les fonctions de Mme B. chez elle sont inconciliables avec la participation de celle-ci à Clonaid ni que cela ait pu créer un amalgame préjudiciable à la société Air Liquide; qu’à cet égard dans aucun article Mme B. ne fait état de son emploi à Air Liquide ni ne cite cette société ; que le fait que par le biais d’autres membres du personnel d’Air liquide la direction de la société ait été interrogée sur l’implication de Mme B. dans le clonage, il n’est pas établi que ces personnes aient pensé que l’attitude de Mme B. engageait la société, qu’il n’est pas fait état que des tiers de l’entreprise aient questionné la société sur ses liens éventuels avec une telle pratique ou avec l’église raëlienne qui anime tant Valiant Venture que Clonaid ; que dès lors, rien n’est établi que le comportement de Mme B. ait pu laisser penser que la société Air Liquide était impliquée, à quelque titre de ce soit, dans ces pratiques ;

– Que les débats n’ont pas démontré l’exécution fautive du contrat de travail de Mme B. ;

– Que les motifs de licenciement tirés de l’implication de Mme B. dans le clonage humain qui apparaît dans l’article du Monde, au delà de l’appréciation morale d’une telle déclaration et prise de position, relève de la liberté de pensée ; que Mme B. peut prétendre qu’il lui est reproché de développer l’idéologie d’une église raëlienne dont la forme semble se confondre avec une entreprise commerciale prenant l’aspect d’une secte.

– Que le droit du travail français reconnaît à chaque personne le droit de ne pas être inquiété dans son travail à raison de ses opinions politiques ou de ses convictions religieuses, qu’en l’absence d’allégation d’un prosélytisme à l’intérieur de l’entreprise, la société Air Liquide ne peut faire état des convictions de Mme B. pour procéder à son licenciement, étant souligné qu’il n’est pas allégué que Mme B. ait commis à cette occasion un délit ou une infraction pénale ;

– Que le licenciement de Mme B. ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ; qu’elle a plus de deux ans d’ancienneté dans une entreprise de plus de onze salariés, que la cour ne trouve pas d’éléments de préjudice au-delà de l’indemnité minimale de six mois soit sur la base alléguée et non contestée de x xxx francs mensuelle la somme de xx xxx francs ;

– Que la situation de Mme B. ne justifie pas l’allocation d’une indemnité en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement et statuant à nouveau :

Condamne la société Air Liquide à payer à Mme B. la somme de xxxx d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Déboute les parties de leur demande sur le fondement de l’art 700 du code de procédure civile

Condamne la société Air Liquide aux dépens.