Discours du 6 octobre 2010
Je vous remercie Monsieur le Président. Aujourd’hui nous souhaitons faire progresser le débat démocratique en démontrant que les pays francophones européens pratiquent une discrimination flagrante et dangereuse entre les cultes reconnus et non reconnus.
Pour le démontrer nous allons parler de la Belgique et du statut extraordinaire et injustifié dont jouit l’église catholique avec des conséquences graves pour les citoyens et les minorités religieuses.
Il faut rappeler qu’il n’existe en droit belge aucune distinction reposant sur une disposition légale entre un « culte » ou une « religion » et une « secte » et que toute tentative en ce sens serait nécessairement discriminatoire et incompatible tant avec la Constitution qu’avec la Convention européenne des droits de l’homme.
Madame Asma Jahangir, Rapporteuse Spéciale des Nations Unies sur la Liberté de Religion ou de Conviction, déclarait dans son rapport de 2006 que « la politique de la France envers les “sectes” (sur laquelle s’est basée aussi la commission parlementaire belge sur les sectes”) a contribué à créer un climat de suspicion et d’intolérance générale envers les organisations listées dans la liste des « sectes ».
En Belgique on a donc cessé officiellement de lutter contre les sectes, on lutte, selon la loi, contre les « organisations sectaires nuisibles ». Le terme « organisation sectaire nuisible » est un concept assez flou créé par l’Etat belge afin d’éviter le terme méprisant de « secte ». Dans l’ensemble sont considérées comme des « sectes » en Belgique presque toutes les minorités religieuses non reconnues. Le terme « secte » devenu aujourd’hui une insulte et utilisé abondamment auparavant par les autorités – on se souvient malheureusement de la commission d’enquête sur les sectes » – a été abandonné suite aux nombreuses contradictions qu’il suscitait envers l’esprit des droits de l’homme.
Ainsi les termes « organisation sectaire nuisible » et « dérive sectaire » utilisés aujourd’hui permettent, tout en étant malgré tout encore flous, non définis et donc risqués dans leur utilisation, un léger progrès dans la désignation des groupes religieux dangereux. Ces derniers seront appréciés sur base non plus de jugements de valeur mais sur base de comportements et de faits précis comme par exemple des manquements à la loi. Le progrès le plus significatif réside sans doute dans le fait que ces termes peuvent s’adresser à tout groupe religieux, qu’ils soient minoritaires ou majoritaires.
En effet par organisation sectaire nuisible, la loi entend : « Tout groupement à vocation philosophique ou religieuse ou se prétendant tel qui, dans son organisation ou sa pratique, se livre à des activités illégales dommageables, nuit aux individus ou à la société ou porte atteinte à la dignité humaine« . Au vu des révélations actuelles il est donc tout à fait légitime de classer l’Eglise catholique comme organisation sectaire nuisible vu qu’un nombre impressionnant de ses responsables se sont livrés à des pratiques condamnées par la loi en profitant de leur vocation religieuse. Ce classement est d’autant plus possible qu’aucune disposition de loi ne permet au CIAOSN de déterminer quel type de groupe correspondrait à la notion d’ « organisation sectaire nuisible ». Ainsi un culte reconnu peut tout aussi bien se retrouver classé « organisation sectaire nuisible ».
Les preuves de dérives sectaires, termes chers aux gouvernements français et belges, sont traitées presque chaque semaine dans les médias : entrave à la justice, dissimulation de preuves, protection de criminels, abus de confiance, abus sur des mineurs, tentatives de corruption, non-assistance à personne en danger, et sans doute plus encore. Certaines victimes d’abus sexuels des prêtres catholiques vont d’ailleurs plus loin comme les centaines réunies ce 25 septembre en Italie pour lancer un appel international pour que ces actes de pédophilie soient reconnus comme un « crime contre l’humanité ». Evidemment la démonstration d’activités « illégales ou criminelles» devra nécessairement résulter de décisions judiciaires qu’une grande partie de la population attend avec impatience.
En attendant si un groupe religieux minoritaire cumulait avec autant d’horreur toutes ces mêmes dérives sectaires citées dans les médias que celles de l’église, l’étiquette d’ « organisation sectaire nuisible » ou pire de « secte » pleuvrait à verse.
Cependant l’état belge continue à faire bénéficier l’Eglise catholique d’un statut exceptionnel et le CIAOSN ne réagit pas en ce sens. Le CIAOSN continue à lutter contre les minorités religieuses alors qu’aucun fait grave ne voit le jour et se tait sur l’église catholique.
On voit donc bien ici que le CIAOSN ainsi que la Miviludes en France a bien été crée pour lutter exclusivement contre les minorités religieuses. Nous ne demandons nullement de faiblir dans la lutte contre les activités pénalement répréhensibles, mais de le faire sans discrimination aucune, tant au sein des cultes reconnus que des minorités religieuses non reconnues.
Nos recommandations sont toujours les suivantes :
- La dissolution du CIAOSN qui crée plus de problèmes qu’il n’en résout.
- Une condamnation et une correction des services de renseignements belges
- Une modification du « centre de l’égalité des chances » en Belgique pour qu’il devienne un organisme qui promeut aussi la tolérance et le respect des membres des minorités religieuses
- Une destruction officielle du fameux rapport parlementaire belge établissant une liste de « sectes », en présentant les excuses du parlement
- Une pénalisation de l’usage discriminatoire de la liste des sectes, car même si elle n’a aucune valeur juridique, elle a un pouvoir moral et social de discrimination.