Par Dominique Georges Luc MAGUIN, documentaliste français, auteur de l’étude Lassolas – Surrection Raélienne
Pourrait-on imaginer un droit ou un Droit fondé sur l’idée que 2 et 2 font 3 ?
Non, bien sûr.
Le Droit, par définition, est compatible avec la logique, donc avec la science.
Ce n’est pas par hasard que la Révolution française a enfanté à peu près au même moment la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (26 août 1789) (cf ici et la), et… le système métrique (entre 1790 et 1795) !
En 1789, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, dès ses premières lignes, a pour repères des entités aussi scientifiques que cela était possible à cette époque :
– L’Homme, ou « être humain », est la référence objective, incontestable, en tant qu’être « naturel », c’est-à-dire faisant partie des phénomènes naturels, comme ceux que les savants de cette fin du 18e siècle et du début du 19e commencent à étudier sans a priori religieux : c’est à la même époque que la Convention crée le Muséum d’Histoire Naturelle de Paris : le naturaliste Lamarck y créera en 1800 le concept de biologie, et son « transformisme » aura du moins le mérite de faire échapper définitivement la science à l’emprise de l’Église catholique.
– La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, exactement au même titre que le système métrique, sera fondée « sur des principes simples et incontestables ».
– Comme l’indique l’étymologie, la « naissance » ne se contente plus de se référer à un ancêtre ayant vécu des années ou des siècles plus tôt, si « noble » soit-il, mais à la nature, qui est l’origine commune de tous les êtres humains, fondement de leur égalité et de leur fraternité.
– La liberté découle, elle aussi, de cette même « nature » : c’est, tout simplement, le laisser-faire, le lâcher-prise, à l’égard de la nature qui est « présumée innocente ».
– Mais, comme on l’observe dans la « nature », pour que la liberté d’un individu A soit acceptable, elle doit aussi respecter celle d’un individu B, C, etc… : c’est toute l’importance de l’article 4 de cette Déclaration.
Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789
Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée Nationale, considérant que l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de l’Homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des Gouvernements, ont résolu d’exposer, dans une Déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l’Homme, afin que cette Déclaration, constamment présente à tous les Membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs ; afin que les actes du pouvoir législatif, et ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés ; afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous.
En conséquence, l’Assemblée Nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l’Etre suprême, les droits suivants de l’Homme et du Citoyen.
Art. 1er. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.
Art. 2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression.
Art. 3. Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément.
Art. 4. La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi.
Art. 5. La Loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui n’est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas.
Cet article 4 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 est donc le véritable pivot permettant l’articulation entre la science et le Droit :
– Elle proclame la légitimité de tout ce que l’être humain peut faire quand il donne libre cours à sa « nature » :
- Se mettre nu
- Parler, crier
- Bouger
- Faire tous les gestes qu’il veut, y compris les plus « obscènes »
- Dire tout ce qu’il a envie de dire
- Parler à qui il veut,
- Aller où il veut
- Etc…
– Mais attention :
- Si je suis avec une autre personne, je risque de la gêner :
- Par mon odeur ou par mon aspect, si je me mets nu
- Par le bruit que je fais
- Par mes paroles
- Etc…
- Si je vais sans autorisation en un lieu où « habite » une autre personne, je vais, non seulement la gêner, mais l’empêcher de vivre normalement
- Etc…
Et réciproquement !
D’où l’article 5 !
Et tout le corpus du Droit, c’est le développement de l’article 5 : c’est la définition de limites à ma liberté de bébé déluré !
Cependant, en moi-même, il est sain que je me réfère à chaque instant à ce fameux article 4 de 1789 :
Ma liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice de mes droits naturels n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi.
Donc, d’abord, j’ai le droit d’être :
– Noir ou blanc…
– Hétérosexuel ou homosexuel…
– Catholique, protestant, bouddhiste ou musulman… ou même raëlien !
Et j’ai donc aussi, comme le dit l’article 4, le droit de « faire » :
– Faire l’amour avec une personne du même sexe que moi
– Regarder le ciel et photographier une soucoupe volante
– Rencontrer des personnes qui me ressemblent
– Dépenser mon argent pour acheter ou financer ce que je veux, y compris… une ambassade pour les E.T !
– Etc…
Et si l’on m’insulte ou si l’on me discrimine, on « me nuit » et la loi me protège – ou est censée me protéger –.
Car la loi interdit de désigner :
– Un noir comme un « nègre »
– Un homosexuel comme un « pédé »
– Une religion comme une « secte »
C’est ce que l’on appelle une insulte.
Car le mot “secte” est péjoratif, et, même insultant, et diabolisant.
Comme les termes de toute sorte par lesquels certains obscurantistes désignent les homosexuels ou les athées, il suggère que l’”adepte” d’une “secte” est “contre-nature” ou “dans l’empire du Mal”, dans une zone de l’esprit qui échappe à la Science, donc aussi au Droit.
Brûler un homosexuel, ou présumé tel, ou accusé comme tel, sous un nom péjoratif – ce fut le cas des Templiers au 14ème siècle –, c’est considéré comme un acte de purification de la société, de la chrétienté, etc…
Bref, il y a une catégorisation abusive entre “secte” et “religion”, mais, ce qui est encore plus grave, c’est que l’emploi d’un terme insultant et diabolisant autorise un individu grégaire et inconscient à tous les lynchages, à n’importe quelle extermination, comme on le voit dans certains pays à l’égard des homosexuels par exemple.
C’est pourquoi j’insiste sur le fait qu’il faut dépasser la simple prise de conscience de l’équivalence foncière entre une “secte” et une “religion”, que dénonce Anne Morelli, et enclencher un dialogue tous azimuts au sein duquel nous exigerons que le mot “secte” soit banni, au même titre qu’un débat sur les droits des homosexuels exclut le mot “pédé”.
Et c’est là que l’enseignement d’Anne Morelli prend toute son importance et son autorité : personne, au sein d’un dialogue ou d’un débat, n’a le droit de désigner la religion de l’autre comme une “secte”, non seulement parce que cela est injurieux, mais aussi parce que cela est non-scientifique, donc indigne d’un débat qui se veut d’un niveau élevé.
Ainsi, à la lumière des Droits de l’Être humain, et de son berceau que fut la Révolution française de 1789, l’exigence de toute religion nouvelle d’être reconnue comme une religion tout court, est, d’abord, fondée sur ce fameux article 4 qui interdit à quiconque de « me nuire ».
Mais aussi sur la science qui s’est épanouie au siècle des Lumières, et qui est la vraie source de notre Droit.
Disons-le à nos interlocuteurs : le Droit est fondé sur la Science, et toute religion est l’expression d’un droit naturel qui les invite à :
– Respecter notre bien-être
– Accepter la réalité scientifique, qui est la diversité des expressions et des convictions religieuses.